Sophie Frilley (CEO de Titrafilm) : "La volonté d’ouvrir la voie à un avenir plus diversifié"

8 mars 2024
Les disparités hommes-femmes dans les métiers du savoir-faire technique de l’image et du son sont une réalité. Malgré des actions récentes menées en matière d’égalité des sexes, parmi lesquelles on peut citer la parité au sein du Comité Directeur de la FICAM, du chemin reste à parcourir pour atteindre la parité au sein des entreprises de post-production, de moyens de tournage, de VFX, de localisation et de services numériques.
Sophie Frilley

En 2022, parmi les effectifs permanents des entreprises des industries techniques, seul un tiers des postes est occupé par des femmes. Leur revenu moyen annuel s’élève à 42.732 euros, inférieur à celui des hommes, à 51.182 euros. En 2022, 43% des salariées permanentes occupent des fonctions administratives et 27% d’entre elles exercent des métiers techniques. Les postes dans lesquels les femmes sont les plus représentées se situent entre les échelons 1 à 6 de la convention collective nationale des entreprises techniques au service de la création et de l’événement : accueil (53%), administration, (91%), commercial (64%), comptabilité (68%), planning (69%) et vidéo (57%). Côté intermittents, 45% des professions artistiques sont occupées par des femmes, quasi absentes des fonctions techniques. A quand davantage de femmes chefs de projet, techniciennes son, image, numériques, lumière, décoration, machinerie, davantage de directrices d’exploitation, finance, commercial, innovation, informatique ? A quand davantage de directrices générales et de présidentes d’entreprises, les postes de direction étant aujourd’hui occupés à seulement 19% par des femmes ?


Davantage d’efforts vers l’inclusivité

Dans ce secteur créatif et technique, qui consiste à assurer la fabrication des contenus cinématographiques et audiovisuels pour le compte des producteurs, le déficit de personnes qualifiées va structurellement s’accentuer avec l’accroissement du nombre de productions en France et la réalisation du plan France 2030-La Grande Fabrique de l’Image. 

Puisque les femmes ne représentent que 32 % de la main-d’œuvre de l’industrie, il semble que la conduite d’efforts vers plus d’inclusivité est une opportunité. La découverte des métiers du cinéma et de l’audiovisuel dès le collège est une piste à explorer pour favoriser l’orientation des jeunes filles. Le manque de femmes leaders peut également retenir celles qui envisagent de s’engager dans cette voie. On peut remédier à cela en mettant plus en lumière les profils des professionnelles en place, leurs compétences et leurs parcours afin d’inspirer de futures candidates. Des associations comme PFDM, le Média Club’Elles, le collectif 50/50 ou le think tank Le Lab Femmes de Cinéma, contribuant à créer des connexions entre les femmes y travaillant, ou intéressées par ce secteur font exemple.

Les entreprises des industries techniques ont par ailleurs chacune un rôle individuel à jouer.

Chez Titrafilm, dès la création de l’entreprise en 1933, alors qu’elle inventait le sous-titrage, l’habileté des mains féminines était préférée pour manipuler les minuscules clichés en zinc composant les sous-titres ou pour effectuer les travaux de manutention et de préparation de la pellicule avant et après la gravure des sous-titres. Pour l’adaptation des films et des séries, il y eut traditionnellement davantage d’opératrices de repérage, de sous-titrage, et d’auteures des versions françaises et étrangères demandées à Titrafilm par ses clients, en vue de leur sous-titrage ou leur doublage. 


De nombreuses femmes aux postes de direction

Entreprise familiale, Titrafilm a été fondée par des hommes, puis dirigée successivement par des femmes, selon les générations et est aujourd’hui pilotée par un binôme homme-femme. Le taux de parité y atteint 45% et de nombreuses femmes occupent des postes de direction de pôles : finance, doublage, sous-titrage, services numériques... Au sein des départements techniques ont récemment été engagées et formées de jeunes ingénieures du son et des techniciennes numériques.

L’Ecole Titra, le centre de formation continue créé pour renforcer les compétences des professionnels de la localisation et de la post-production, forme chaque année autant de femmes que d’hommes sur environ 700 stagiaires.

Deux départements demeurent à féminiser : la postproduction, Titrafilm venant d’acquérir la société A La Plage Studio et proposant désormais au cœur de Paris une offre complète de gestion de rush, montage image et son, étalonnage, post synchronisation et mixage ainsi que la R&D, de manière à associer aux talents des hommes qui y opèrent, ceux de femmes tout aussi innovantes