Françoise Marchetti : (Présidente de l’association pour les Femmes dans les Médias) : Travailler tous ensemble à la modernisation du PAF

8 mars 2024
Inacceptable, après des années de lois, de déclarations d’intentions, de priorité nationale… les femmes gagnent encore 32% de moins que les hommes à poste et compétences égales et touchent 40% de moins à la retraite.
Françoise Marchetti

C’est étrange de devoir mettre à l’honneur les femmes une fois dans l’année. Mais au fond, tout le monde sait qu’il y a un sujet. Cette journée internationale des droits des femmes a été créée par les Nations Unies lors de la grande vague féministe il y a 70 ans. 70 ans c’est long, faut-il l’arrêter ?

A mon sens pas tant que tous les deux jours et demi, un homme tue sa compagne, que toutes les heures, sont enregistrés 28 faits de violence conjugale (5% des victimes portent plainte), toutes les six minutes, un homme prend le corps d’une femme pour se satisfaire et la viole et moins de 1% de ces viols donnent lieu à une condamnation de justice.

C’est vrai que cela occupe beaucoup la société française, les médias et en particulier le monde de la culture et de l’audiovisuel en ce moment. C’est vrai, qu’on aimerait tous passer à un sujet plus réjouissant… mais en 2023 les violences et les viols ont augmenté respectivement de 8 et 10%, c’est étrange car cela devrait allez mieux. Mais comment faire évoluer la société sans régler cela avant ?

"Changer les mentalités en profondeur” 

Moins sanglant mais tout aussi inacceptable, après des années de lois, de déclarations d’intentions, de priorité nationale…  les femmes gagnent encore 32% de moins que les hommes à poste et compétences égales et touchent 40% de moins à la retraite tandis que la maternité bloque leur carrière. Ainsi, 83% des postes de direction sont tenus par les hommes, 90% dans le top management. 

En 2022, seules 2% des entreprises ont obtenu la note maximale de l’index de l’égalité professionnelle pourtant obligatoire…

Depuis 10 ans, les femmes se rassemblent par corporation professionnelle, dans le privé et le public. Deux gaps les rassemblent pour “changer les mentalités en profondeur” comme le réclame Sylvie Pierre-Brossolette, Présidente du HCE, qui fait un travail remarquable.

Chez PFDM, « Pour les femmes dans les médias », association crée par Françoise Laborde en 2012, puis présidée par Laurence Bachman (avec Bouchera Azzouz un temps a ses côtés) qui vient de me passer le flambeau, nous œuvrons pour laisser une société plus égalitaire aux nouvelles générations. Avec l’aide d’un grand nombre de femmes merveilleuses, toutes bénévoles, nous travaillons en bonne intelligence avec tout le secteur.

Implicatione et formation

Et les choses bougent ! Par exemple avec les quotas de réalisatrices de fiction et documentaires mis en place par FTV ou encore, les enveloppes qui leur sont dédiées pour le cinéma par Canal +, l’attention apportée à la parité par FMM, le baromètre PFDM-BVA-MozaikRH-Audiens de la diversité utilisé par Disney, les « Expertes » antenne formées par TF1, l’implication des dirigeants de M6, l’INA, NRJ, Radio France et des producteurs envers nos actions, la formation contre le harcèlement sexuel et les attitudes sexistes qui conditionne l’obtention des subventions et le bonus Parité cinéma du CNC, les mesures de prévention (la cellule d’écoute Audiens) mises en place par les partenaires sociaux…

Pourtant…  Faisons le compte : 5% de compositrices, 7% de directrices photo, 16% de réalisatrices fiction. 30% dans les rédactions de presse écrite, 33% à la réalisation cinéma, 17% à la direction d’un opéra, 11% des postes de la cybersécurité alors que l’intelligence artificielle se nourrit des algorithmes.

PFDM agit (chartes, études, baromètre de la diversité) et occupe le terrain (festivals, mentoring…)  grâce au soutien de l’ensemble du secteur (institutionnels, groupes public-privé) mais il faut encore travailler tous ensemble à la modernisation du PAF : fin des violences, parité, diversité, égalité salariale, évolution de carrière notamment pour les femmes de plus de 50 ans, parentalité, santé mentale..tels sont les chantiers encore devant nous.