Fusion TF1-M6 : pour Bouygues, "le statu quo n'est pas possible"

1 décembre 2021
Auditionné au Sénat, le directeur général de Bouygues plaide pour une fusion effective début 2023.
Olivier Roussat

Les commissions de la culture et des affaires économiques du Sénat ont auditionné ce mercredi 1er décembre le directeur général du groupe Bouygues, Olivier Roussat, propriétaire de TF1 et futur actionnaire de référence de l’ensemble TF1-M6. La fusion entre les deux chaînes doit aboutir en 2023, si elle obtient l’aval des deux régulateurs compétents : le CSA (future Arcom) et l’Autorité de la concurrence.

Le dirigeant insiste d’ailleurs sur le caractère urgent du dossier, en évoquant la date de janvier 2023 pour clore le dossier. “TF1 et M6 doivent renouveler leur licence en mai 2023, il faut se mettre en mouvement”, indique-t-il, avant d’expliquer qu’un renouvellement de licence par le CSA bloquerait l’actionnariat des chaînes jusqu’à 2028. Hors, face à la percée des géants du streaming, “le statu quo n’est pas possible”. “Le business model des groupes audiovisuels est en train de changer”, constate Olivier Roussat. Si le marché publicitaire à la télévision est relativement stable depuis des années, celui du digital continue de croire “de façon systémique” et “est accaparé à 90% par les GAFAM”.

“A l’horizon 2024-2025, 40% du temps passé devant le téléviseur ne sera plus linéaire”, avance le DG. “Nous devons être capable d’adresser la demande des téléspectateurs. Nous n’avons pas l’intention ni les moyens de concurrencer Netflix. Nous cherchons à faire vivre notre business model de télévision gratuite, mais il est nécessaire de pouvoir proposer une offre de type streaming, avec des contenus plus locaux que ce que peuvent développer les sociétés comme Netflix.”

"Les quantités d'argent investi iront en s'accroissant"

Face aux questions sur la possible place hégémonique du nouvel ensemble sur le marché de la publicité TV, avec 75% de part de marché, le dirigeant de Bouygues avance deux arguments : les marchés de la publicité télé et de la publicité digitale se ressemblent de plus en plus, et la durée d’écoute individuelle des téléspectateurs est en chute libre. Olivier Roussat se dit donc “serein” quant à la taille du marché qui sera jugé pertinent par l’Autorité de la concurrence : “C’est un marché plus grand que le marché télévisuel.” Les Français “passent de plus en plus de temps devant YouTube sur leur télévision. Et certaines pubs y sont en tous points similaires à celles en télé”, donne-t-il comme exemple pour illustrer son point de vue.

Interrogé sur une baisse possible des investissements du nouvel ensemble dans la création, Olivier Roussat rappelle que les obligations des chaînes sont fixées en fonction de leur chiffre d'affaires. “Nous n’avons pas pour projet de faire baisser notre chiffre d’affaires. A pourcentage constant, les quantités d’argent investi iront en s’accroissant”, avance-t-il.  “Nous allons avoir des discussions avec le CSA sur les efforts à faire à ce sujet, et un certain nombre d’organisations de professionnels de la production auront des idées à communiquer au CSA.”

Sur la cession de fréquences TNT ou la vente de chaînes - TF1 et M6 possèdent 10 chaînes et le nouvel ensemble ne pourra en garder que sept - le dirigeant affirme que le scénario n’est pas encore écrit. “Il y a une double lecture : pour le CSA, il faut rendre trois canaux sur la TNT”, et les chaînes peuvent continuer d’exister sur les box, “mais pour l’Autorité de la concurrence, selon la puissance de vos chaînes, on peut vous demander d’en céder”.

Se posera ensuite la question des possibles acquéreurs et de leur identité. “Le CSA est très vigilant” à ce sujet, rappelle Olivier Roussat.

Enfin, à la question d’une possible vente de TF1 si la fusion ne peut pas avoir lieu, le DG de Bouygues ne dit pas clairement non, mais évoque plutôt un renforcement du groupe dans le streaming et les contenus : "Si l’opération ne devait pas se faire, nous prendrons les décisions nécessaires pour permettre de garantir la profitabilité et la rentabilité. Cela passera probablement par un renforcement dans les aspects streaming et dans tout ce qui est contenus puisque la demande est très forte à l’heure actuelle."