Publicité : perspectives sombres pour les "vieux médias"

31 janvier 2024
L’avenir des recettes publicitaires des acteurs traditionnels n’est guère encourageant. Ceux qui investissent dans les contenus d’information et de création vont perdre 800 millions d’euros de recettes publicitaires d’ici 2030. 

L’étude prospective du cabinet PMP Strategy présentée le 30 janvier par l’Arcom et la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la Culture, évalue à l’horizon 2030 le marché publicitaire à 18,3 milliards d’euros par an contre 15,2 milliards en 2022. 

Cette augmentation ne bénéficiera pas aux cinq médias historiques mais uniquement aux acteurs numériques qui capteront une part croissante de ce marché : 65% en 2030 contre 52% en 2022, dont 45% pour les quatre grandes plateformes extra-européennes (Alphabet, Meta, Amazon et Tiktok). 

Les revenus numériques des acteurs historiques, même s’ils progressent de 400 millions d’euros sur la période, ne compenseront pas la baisse de la publicité traditionnelle et représenteront toujours une part modeste du marché total (6,4% en 2030). Et c’est sans compter la part captée par les intermédiaires techniques en publicité programmatique (achat d’espace en ligne par des enchères automatisées), évaluée à 40 % des dépenses des annonceurs et dont l’essentiel va aux services de Google (Google Ad servers...).

Télévision : léger déclin de la publicité jusqu’en 2030 

La télévision affichera une certaine stabilité de ses recettes publicitaires, qui déclineront lentement de 1,4 % par an, passant de 3,5 milliards d’euros aujourd’hui à 3,1 milliards en 2030. Après cette date, « la baisse et le vieillissement de l’audience linéaire », le « développement de l’offre de contenus vidéos à la demande ou de YouTube, et l’essor des téléviseurs connectés » risquent, selon l’étude, de détourner les annonceurs de ce média, au profit d’acteurs numériques. 

Les médias qui investissent dans les contenus d’information et de création, les historiques pour la plupart et certains services de vidéo à la demande comme Netflix et Disney, verront leurs ressources baisser de 800 millions d’euros d’ici 2030, passant de 7,3 milliards d’euros en 2012, à 5,3 en 2030.

Ce diagnostic doit alimenter les réflexions des Etats généraux de l’information sur l’évolution de la régulation de la publicité « pour protéger les acteurs européens » veut croire Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom, qui estime qu’il « n’y a plus place pour le statu quo

Deux consultations publiques sur la publicité à la télévision 

Dans les prochains jours, l’Arcom va lancer deux concertations. La première portera sur l’autorisation de la publicité pour des films de cinéma à la télévision. L'expérimentation lancée en 2020 arrive à échéance en avril, et il faudra décider de la prolonger ou de rendre l’autorisation définitive. L’interdiction de publicité TV pour l’édition littéraire sera aussi l’un des sujets de ces réunions. 

L'autre consultation portera sur l’évolution de la réglementation de la publicité au niveau national et européen. L’actuelle Commission européenne s’est montrée très active dans la régulation des plateformes, avec la directive SMA par exemple, en appelant à la contribution des plateformes à la création, les règlements DMA et DSA. A l’approche des élections européennes, le président de l’Arcom a fait le vœu que cette dynamique soit préservée.