La TNT : avenir explosif - L'édito d'Eric Libiot

7 février 2024
Eric Libiot, rédacteur en chef d'Ecran total, livre son point de vue sur la semaine écoulée et sur les enjeux de celles à venir.
Nous avons décidé de ne pas toucher au poste - Pierre Abouchahla

L’année vient à peine de commencer que la suivante se fait déjà entendre. Courant 2025, les autorisations d’émettre de quinze chaînes de la TNT arriveront à échéance. D’ici là, il y aura des dossiers à remplir, des engagements à prendre, de la diversité à respecter et même, si ça se trouve, des envies de programmes formidables et passionnants à mettre en avant. Sans trop demander non plus. Les chaînes actuelles de la TNT vont évidemment remettre le couvert et demander la prolongation de leur autorisation. Y en aura-t-il des nouvelles? Pas sûr, mais peut-être, ce qui permet de tout envisager et de ne pas se tromper.

Seul Xavier Niel avait ouvertement déclaré, en février 2023, son intention de se mettre sur les rangs de la télé à l’époque du renouvellement de M6. Il avait été débouté et dans la foulée avait annoncé que s’en était fini du petit écran. Pourtant l’homme est tenace et peut changer d’idée ; c’est le propre des entrepreneurs. Sinon, il devra attendre la proc haine échéance… en 2035. C’est long, surtout vers la fin pour paraphraser Woody Allen. Remarquez que d’ici là, la télé linéaire aura peut-être disparu au profit d’un engouement digital tous azimuts avec une myriade de tuyaux et de plateformes plus ou moins fournis qui risquent de morceler encore davantage le public. Ce qui ne serait pas vraiment très réjouissant.

C’est tout de même agaçant ce PAF qui se divise et se sur-divise comme autant de petites parcelles agricoles (pour être dans l’actu) alors qu’un bon remembrement pourrait être salutaire ; c’est finalement ce qu’on appelle le service public. En parlant de morcellement du public, qui se réchauffe les charentaises devant sa chaîne préférée, et elle seule, on pouvait s’attendre de la part du patron de l’Arcom, Roch Olivier Maistre, à ce que C8 et CNews soient sur la sellette, vu les réprimandes, les amendes et les coups de règle qu’elles se sont pris sur les doigts ; notamment à l’encontre de Cyril Hanouna. Or, lors d’un déjeuner avec la presse, le gendarme en chef du PAF a annoncé que les auditions se feraient en repartant d’une feuille blanche. Et non pas d’un bon pied donc. Si les chaînes ont dérogé à leurs obligations, on efface tout et on recommence. C’est tout de même surprenant (euphémisme). Dans les couloirs biens informés il se dit que l’Arcom n’osera pas s’attaquer aux chaînes de Bolloré à deux ans de la présidentielle. On peut leur faire confiance.

Reste la décision du Conseil d’Etat attendue prochainement qui doit statuer sur le comptage de la parole politique. Aujourd’hui, seuls les propos des femmes et des hommes dûment encartés dans les partis sont pris en compte. Le Conseil d’Etat pourrait changer la donne et inclure aussi les éditorialistes ouvertement classés ici ou là sur l’échiquier politique. Et, plus globalement, toutes prises de position lors de débats, discussions et cafés du commerce télévisuels.

En théorie, c’est une bonne idée : les chaînes se doivent, par obligation, de respecter le pluralisme et on sent bien, ici ou là, que ça dérape dans les virages à droite. En pratique, c’est évidemment beaucoup plus difficile à mesurer. L’Arcom a tout de même annoncé qu’elle se plierait à la décision du Conseil. Mine de rien sa décision pourrait faire trembler le PAF.