Macron se paye la redevance
Le président candidat Emmanuel Macron s'est engagé, lundi 7 mars, à supprimer la redevance télé s'il était réélu, soulignant qu'il s'agissait d'une mesure « cohérente avec la suppression de la taxe d'habitation », à laquelle la CAP (contribution à l'audiovisuel public) était jusque-là adossée, d'ici la fin de l'année. Contrairement aux propositions formulée par d'autres candidats, de Marine Le Pen à Valérie Pécresse en passant par Eric Zemmour, la proposition du Président de la République ne signifie par une promesse de privatisation de l'audiovisuel public, mais de financer à l'avenir ce dernier grâce à un plan de financement pluriannuel, sur trois ou cinq ans, via une loi de programmation. Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal s'en est expliqué, dès le lendemain, pour tenter de rassurer les nombreux professionnels de la filière audiovisuelle inquiets de voir l'exécutif tordre le cou à ce serpent de mer : « ce que nous proposons de supprimer, c'est l'outil, c'est-à-dire la redevance, c'est à-dire faire payer à 28 millions de Français 138 euros quels que soient leurs revenus (88 euros en outre-mer, Ndlr). On a besoin d'un audiovisuel public fort dans un contexte de désinformation (…) parce qu'il participe aussi à la création française. On va continuer à le financer, à garantir ses moyens et son indépendance, et à lui donner de la visibilité sur le long terme ».
Impôt « injuste et archaïque »
Impôt « injuste et archaïque » selon les mots de Christophe Castaner, président du groupe LREM à l'Assemblée nationale, la redevance concerne uniquement les Français qui déclarent posséder au moins un poste de télévision, tandis que les autres modes de réception, de l'ordinateur personnel au smartphone, en sont exemptés alors qu'ils ne cessent de croître. L'étendre à ces derniers, comme le fait déjà l'Allemagne, pourrait cependant avoir un impact négatif sur la campagne naissante du candidat Macron. Tout le contraire de cette suppression qui « rend aux Français du pouvoir d'achat » (Castaner) dans un contexte d'inflation galopante, avec le pouvoir d'achat érigé en priorité de la campagne Macron.
Grâce à la redevance, l'audiovisuel public percevra en 2022 la somme de 3,7 milliards d'euros pour financer France Télévisions (2,4 milliards), mais aussi Radio France (588 millions), l'INA, TV5 Monde, Arte ou encore France 24. Des sommes qui seront justement « pérennisées » par l'intégration de son financement dans le budget global de l'Etat, promet le gouvernement, alors que les revenus de la redevance s'érodaient du fait des nouveaux modes de consommation des médias. Insuffisant, cependant, pour pleinement rassurer les acteurs du secteur. Nombre de ces derniers ont protesté contre un choix jugé « hypocrite et dangereux » par la Sacd : « Hypocrite car les ressources qui ne seront plus issues de la redevance devront être prélevées sur les ressources de l’Etat, financées par les impôts des Français. Dangereux car ce choix aboutira à la fragilisation de l’audiovisuel public et à la remise en cause de son indépendance en soumettant son financement aux aléas et au bon vouloir des décisions gouvernementales conjoncturelles et de chaque loi de finances. »