Séries Mania célèbre son retour avec "Germinal"

26 août 2021
L'adaptation du roman culte d'Emile Zola, sélectionnée en compétition internationale, constitue l'un des temps forts du festival qui démarre ce jeudi 26 août.

Quelle autre oeuvre que Germinal aurait pu illustrer aussi parfaitement le retour des séries dans les Hauts-de-France ? Modernisée sous la forme d'une minisérie de six épisodes, l'adaptation du roman culte d'Emile Zola coproduite avec le service public italien constituera l'un des temps forts de cette édition 2021, qui se veut celle du renouveau. Quatre projections auront lieu dans le cadre de la manifestation, dont l'une sur les lieux même où se déroulent les aventures des protagonistes du livre, la fosse Arenberg à Wallers, près de Valenciennes. Un lieu mythique du bassin minier du Nord où Claude Berri avait déjà tourné son Germinal en 1993. Produite par France Télévisions et la Rai dans le cadre de l'Alliance européenne formée avec la ZDF, cette nouvelle version, qui a également bénéficié d'un financement apporté par Salto, a en conséquence pu bénéficier d'un budget considérable pour une série française : 12 millions d'euros au total, soit deux millions par épisode, le double d'une habituelle série « premium ». 59 acteurs, 2400 figurants et 150 techniciens ont été nécessaires pour tourner cette version modernisée du roman du 19ème siècle signée par le scénariste Julien Lilti (Hippocrate, Family Business) et le réalisateur David Hourrègue (Skam France), produite par Banijay Studios France.

La principale difficulté du projet a été de conserver la trame classique du roman tout en apportant les touches de modernité indispensables à une série de 2021. De séduire les amateurs de l'oeuvre originale tout l'adaptant aux goûts d'un public plus jeune, sans pour autant tomber dans une simplification à outrance. « Le pari était de parvenir à moderniser l'oeuvre sans la dénaturer, en s'inspirant de l'école anglaise, résume le producteur Alban Etienne. Je ne voulais pas que ce soit un simple brûlot contre le capitalisme, même si les thèmes abordés sont malheureusement toujours d'actualité. J'ai souhaité parler de l'être humain des deux côtés de la barrière sociale. Ainsi, le personnage de patron joué par Guillaume de Tonquédec n'est pas aussi binaire qu'il aurait pu l'être. Je voulais éviter au maximum la caricature de l'opposition basique entre ouvriers et nantis. »

Les personnages féminins retravaillés

Pour s'adapter au 21ème siècle, la priorité a été de retravailler les personnages féminins, souvent assez peu développés dans l'oeuvre originale. Plusieurs arches narratives ont ainsi été ajoutées afin d'accorder plus de place aux femmes, sans pour autant dénaturer la réalité historique. « Nous avons parlé avec beaucoup d'historiens qui nous ont expliqué que les femmes avaient beaucoup plus de pouvoir dans le coron qu'on pouvait l'imaginer, poursuit Alban Etienne. Pendant que les hommes travaillaient à 700 mètres de profondeur, ce sont elles qui dirigeaient en surface. » Ecrasé par le patriarcat et le patronat, le personnage de la Maheude, interprété par Alix Poisson, va ainsi se transformer en animal politique. Une évolution également visible hors caméra, puisque les personnages féminins ont été retravaillés par une équipe d'autrices et que la musique de la série est signée par la compositrice Audrey Ismaël, une première pour une série tricolore. Une touche de romance a aussi été ajoutée à l'oeuvre de Zola écrite il y a 135 ans, sans oublier une plus grande diversité dans l'origine ethnique des personnages. « Dès le début, nous avons été clairs à ce sujet : ce sont les acteurs qui comptent avant tout, pas leur couleur de peau, assume le producteur rompu à ces questions depuis Skam France. Par exemple, je voulais absolument avoir Sami Bouajila, qui s'est parfaitement fondu dans le décor. Cerise sur le gâteau, nous avons eu la chance qu'il obtienne un César entre temps, ce qui ne gâche rien ! »

Côté casting, Germinal affiche une distribution trois étoiles avec, outre Louis Peres – découvert dans la série Mental - dans le rôle d'Etienne Lantier, des talents du calibre de Thierry Godard (Maheu), Alix Poisson (La Maheude), Guillaume de Tonquédec ou Natacha Lindinger. Pour séduire les partenaires de la RAI, Valeria Cavalli et Stefano Cassetti, deux acteurs italiens parfaitement bilingues, ont également intégré le projet. Sur le plan artistique, le réalisateur David Hourrègue, qui a décelé une grande similitude entre les corons et le décor des western, a décidé d'orienter la direction artistique dans cette direction. D'où le tournage en format 2.39:1 qui donne à ce Germinal des allures de grande épopée du far west. « Nous nous sommes aussi inspiré des films de James Gray et de Peaky Blinders au niveau de la photo », précise Alban Etienne. Le tournage, lui, s'est avéré plus chaotique : la préparation a été interrompue par le premier confinement à quelques jours du tournage, qui a finalement repris en octobre 2020 jusqu'en février de l'année suivante. Il a en outre été ralenti par plusieurs cas de Covid parmi les comédiens et le réalisateur.

Germinal, qui sera proposé par Salto avant sa diffusion sur les antennes de France Télévisions, illustre enfin la volonté du service public de mieux puiser dans le très riche patrimoine littéraire hexagonal. Un genre que ce dernier a longtemps évité, faute de moyens à la hauteur de ses ambitions, et qu'il entend revisiter en s'inspirant des succès britanniques en la matière ces dernières années. Ce sera par exemple le cas d'une série sur Diane de Poitiers interprétée par Isabelle Adjani et réalisée par Josée Dayan. Banijay Studios France n'est pas en reste puisque la société de production prépare pour Canal+ un portrait de Marie-Antoinette en coproduction avec Capa Drama. Proposant un personnage très éloigné de l'image qu'en ont gardé les livres d'Histoire, la série, qui en est actuellement au stade du casting, est signée par la scénariste britannique Deborah Davis (La Favorite).