Décryptage : La lourde tâche de Rachida Dati à la Culture

12 janvier 2024
Personne ne s’y attendait. Ex-ministre de la Justice (2007-2009) dans les gouvernements Fillon sous la présidence de Nicolas Sarkozy, Rachida Dati est nommée ministre de la Culture du gouvernement Attal, succédant à Rima Abdul-Malak.
Rachida Dati

Membre du parti Les Républicains (LR), Rachida Dati a été exclue juste après l’annonce de sa nomination, a indiqué Eric Ciotti, le président du parti. La maire du VIIᵉ arrondissement est une opposante active au Conseil de Paris de la maire Anne Hidalgo, qui a souhaité "bon courage aux acteurs du monde de la culture compte tenu des épreuves qu’ils vont traverser".

Les changements ministériels réguliers en disent long sur le poids de la Culture dans la politique gouvernementale. La durée moyenne de la présence des ministres rue de Valois est d’à peine deux ans. Ce qui est très peu, à l’aune de la complexité des dossiers qui régissent l’ensemble des activités placées sous la tutelle de cette administration. Les défis créatifs, technologiques et commerciaux qui façonnent et structurent cette industrie, dont le rayonnement dépasse largement nos frontières, méritent de donner du temps au temps. Ce qui n’est plus le cas depuis plus de dix ans. A peine, la (ou le) ministre arrive aux affaires, comprend et maîtrise les enjeux du secteur, que la politique le fauche au profit d’une consœur ou d’un confrère, qui revit les mêmes affres.
La Culture compte de nombreuses organisations puissantes sachant faire valoir leurs causes rue de Valois. Cela impose aux politiques de les écouter (longuement et parfois, souvent) avant de trancher avec des jugements de Salomon pour maintenir un équilibre fragile afin d’éviter de gripper la créativité des entreprises culturelles face à une farouche concurrence européenne et étrangère.
« Rien de pire que le zapping ministériel, écrivait hier soir le directeur de la SACD, Pascal Rogard sur X, saluant le travail de Rima Abdul Malak et son « engagement pour la création sous toutes ses formes et de son amour sincère de la culture ». Elle aura payé cher ses prises de position après la diffusion du documentaire sur Gérard Depardieu et sur la loi Immigration, et ce, malgré les démentis sur Instagram de sa menace de démission. Emmanuel Macron en a décidé autrement.


Rachida Dati arrive donc rue de Valois où l’attendent de nombreux sujets à commencer par celui du financement de l'audiovisuel public, les contrats d'objectifs et de moyens ou l’extension du Pass Culture… sur fond de grèves perlées dans l'audiovisuel. Mais Rachida Dati a devant elle du temps (deux ans et demi au mieux jusqu’à l’élection présidentielle) pour s’approprier de ces dossiers, à moins d’être ralentie par les affaires, notamment sa mise examen depuis juillet 2021 dans l’enquête sur une filiale de Renault Nissan. Elle a de l’ambition, de l’audace, du talent et de l’énergie. Gageons qu’elle ira plus vite qu’on ne le pense, et souhaitons-lui bonne chance.