La place des femmes dans l’audiovisuel et le cinéma s’améliore, mais des écarts de rémunération subsistent
Le chemin vers la parité dans le cinéma et l’audiovisuel progresse mais il reste des points d’amélioration. C’est en substance ce qu’il faut retenir de la dernière édition de l’Observatoire de l’égalité femmes-hommes du CNC, portant sur l’année 2022, et présenté ce lundi 27 novembre.
Le nombre de femmes salariées dans le secteur progresse encore en 2022, pour atteindre 110 710, en hausse de 0,4 point par rapport à 2021 et 1 point par rapport à 2019. Ce sont les métiers de la prestation technique et surtout de la production qui portent cette hausse. Dans la production, qui pèse pour 78% des effectifs du secteur, le nombre de femmes a augmenté de 14,9% depuis 2019.
Féminisation de l’animation
“Ce sont les secteurs les plus en retard qui progressent le plus”, remarque Cécile Lacoue, directrice des études, statistiques et de la prospective au CNC. C’est notamment le cas de la production d’animation, où la part des femmes a augmenté de 3,1 point entre 2019 et 2022, pour atteindre 40,3%.
Les premiers chiffres sur l’année 2023 confirment la tendance. Selon le Datalab d’Audiens, le nombre de femmes salariées chaque mois dans le secteur progresse plus rapidement que le nombre d’hommes sur la période allant de janvier à septembre (3,1% contre 1,8%).
“L’engagement soutenu des pouvoirs publics y est pour quelque chose dans cette réussite”, a affirmé Dominique Boutonnat, le président du CNC, dans son discours introductif, soulignant le fait que 34% des FIF agréés en 2022 étaient éligibles au bonus parité. Ils n’étaient que 12,9% en 2019. Cette aide mise en place en 2019 permet aux films dont les équipes sont paritaires de bénéficier de 15% d’aides supplémentaires.
Des métiers toujours polarisés
Certains métiers du cinéma et de l’audiovisuel restent toutefois polarisés. Dans la fiction TV, seulement 21,3% des cascadeurs et 11,1% des techniciens du son sont des femmes. Dans le cinéma, il s’agit ici de chiffres de 2021, la polarisation est encore plus marquée. Les femmes comptent pour 90,5% des techniciens costumes, mais seulement 5,3% des techniciens du mixage. Elles ne comptent que pour 32,8% des compositeurs de musique et 8,8% des cascadeurs.
Le CNC constate également des écarts de salaires entre les femmes et les hommes sur la majorité des métiers. En fiction télévisée, c’est notamment le cas des techniciennes de l’image, qui sont en moyenne moins bien payée de 27,4% par rapport aux hommes, des techniciennes son (-24,3%) et des réalisatrices (-24%). En revanche, le CNC observe que les actrices sont en moyenne aussi bien rémunérées que les acteurs, voire même mieux payées dans certaines tranches d’âge (+22,2% pour les 40-49 ans).
Au cinéma, où il s’agit encore une fois de chiffres de 2021, les techniciennes de l’image sont en moyenne payées 25,9% de moins que les hommes, et celles du son 15,2% de moins. En revanche, les salariées dans la construction de décor sont presque aussi bien payées que leurs homologues masculins (seulement 1,7% de moins). Les actrices sont elles payées en moyenne 15,5% moins bien que les acteurs. En revanche, les cascadeuses sont payées 6,3% de plus que les cascadeurs.
La politique volontariste de France TV porte ses fruits
Le CNC note une progression de la part des femmes parmi les réalisateurs de fiction audiovisuelle, qui est passée de 32,9% en 2016 à 38,5% en 2022. Cette hausse est portée par les chaînes publiques. La part des femmes réalisatrices dans les fictions produites pour France Télévisions a augmenté de 10,6 points depuis 2016, pour atteindre 41,4%, et pour Arte France de 12,5 points, pour atteindre 37,7%. Chez les diffuseurs privés, cette part reste fluctuante, sans qu’on puisse dégager de tendance.
“La progression de la place des femmes chez France Télévisions est le résultat de la politique volontariste de [la présidente du groupe] Delphine Ernotte”, analyse Cécile Lacoue. Le diffuseur a mis en place un quota de femmes réalisatrices en 2020.
Pour les œuvres audiovisuelles, le CNC impose depuis cette année aux producteurs de remplir un formulaire parité sur l’ensemble des chefs de postes. “Nous analyserons toutes ces données en 2024”, indique Cécile Lacoue. Le CNC discutera ensuite avec les professionnels de l’attitude à adopter.
Le devis moyen des films réalisés par des femmes reste plus bas
Au cinéma, la part des films réalisés ou coréalisés par des femmes est elle aussi en hausse. On comptait 69 films d’initiative française (FIF) entrant dans cette catégorie en 2022, soit 33,2% des films agréés. Un hausse de 6,8 points par rapport à 2013.
Le CNC observe aussi que le devis moyen des films réalisés par des femmes (3,71M€) reste inférieur à celui des films réalisés par des hommes (4,72M€). Cependant, cet écart se réduit. “Les structures de financement sont relativement proches”, ajoute Cécile Lacoue. “Toutefois, il y a une part supérieure d’aides publiques pour les œuvres réalisées par des femmes et les mandats de distributeurs sont moins élevés.”
Pour la première fois, l’Observatoire de l’égalité femmes-hommes se penche sur le parcours des réalisatrices après leur premier film. Le CNC constate que les difficultés pour passer au deuxième et troisième long métrage ne sont pas supérieures pour les femmes. Cependant, le délai pour réaliser le troisième et le quatrième film est supérieur pour les réalisatrices.
Au fur et à mesure que leur carrière avance, l’écart entre les devis moyens des femmes et des hommes s'accentue. Pour les premiers longs métrages, celui-ci est en moyenne inférieur de 21,4% pour les femmes. Pour les cinquièmes longs, l’écart atteint 66,6%.
Lisez la présentation en intégralité sur le site du CNC.