L’exploitation se prépare aux enjeux de demain

27 septembre 2023
Du 19 au 21 septembre dernier, le Congrès de la Fédération Nationale des Cinémas Français (FNCF) a été l’occasion de jouer cartes sur table pour l’ensemble des participants, exploitants et institutionnels. Les transitions écologiques et énergétiques ont longuement été débattues tandis que les pouvoirs publics ont eu l’occasion de se pencher plus longuement sur l’aménagement des futurs engagements de programmation et de diffusion, attendus pour certains, redoutés pour d’autres.
Congrès FNCF

À peine avait-il débuté que le Congrès des exploitants de Deauville s’est aussitôt orienté vers la thématique qui anime ardemment les salles de cinéma depuis quelques mois : la transition énergétique. Cela en raison d’une inflation des coûts de l’énergie qui ne cesse de prospérer. À cette occasion, il a été annoncé la mise en place d’une nouvelle commission dédiée à l’écologie des cinémas. Celle-ci, présidée par Marie-Christine Désandré, aura pour membres des représentants de toutes les catégories d’exploitation. Ses premiers travaux porteront sur la conception d’une méthodologie visant à mettre en place un plan d’action efficace. La généralisation des projections laser semble d’ores et déjà incontournable, avec une réduction de 10% de la consommation énergétique. C’est ce qui a été rappelé lors de la traditionnelle séance des rapports de branche, où la petite exploitation a pu témoigner de la souffrance de certains exploitants face à une hausse continue de l’inflation, amenant une réduction des marges et bénéfices des cinémas qui ne peuvent alors plus investir suffisamment pour se moderniser et rester attractif.

De son côté, la moyenne exploitation espère la création d’un fonds dédié à la "laserisation" du parc de salles en raison de l’explosion des dépenses énergétiques. Le Président de la Fédération nationale des cinémas français, Richard Patry, a rappelé combien l’exploitation avait eu l’occasion de prendre au sérieux la transition écologique, que ce soit à travers la publication d’une charte sur les économies d’énergie ou sur les usages à adopter afin de réduire la consommation énergétique. Et l’institution ne compte pas s’arrêter là. "Notre plan d’installation de projecteur laser devrait nous permettre d’économiser la consommation énergétique d’une ville de 20 000 habitants sur une année, témoigne le président de la FNCF. Il doit être financé à hauteur de 400 M€ et nous espérons bénéficier du soutien du CNC ainsi que des collectivités territoriales, comme la région Grand-Est qui a récemment investi 1,8 M€ pour aider les cinémas de son territoire à réussir leur transition énergétique."

Objectiver les données des salles

La traditionnel débat avec les pouvoirs publics a d’abord permis de rappeler combien la structure même de l’activité de l’exploitation avait changé depuis l’année triomphale de 2019, notamment avec la fin des VPF et l’effet que cette dernière a pu avoir sur les plans de sortie. La FNCF attend donc impatiemment les prochaines études de l’Observatoire de la diffusion afin de mieux étudier la répartition des entrées, sur les films comme les salles, et "objectiver ces données".

Bien que n’ayant pu faire le déplacement à Deauville, la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, a néanmoins adressé un message aux exploitants présents dans la salle du CID. "Nous étions si inquiets de la fréquentation l’an dernier. Elle s’est finalement redressée grâce à notre diversité et à notre production locale forte. Désormais, il nous faut continuer à accompagner les évolutions du marché. Pour cela, nous réfléchissons à de nouveaux dispositifs de régulation. À ce titre, la réforme du classement art et essai devra permettre de mieux soutenir la prise de risque des exploitants dans leur programmation audacieuse, tout en assurant que la diffusion du cinéma d’auteur soit plus justement répartie sur tout le territoire français."

Le CNC réaffirme son engament à l’exploitation

Le président du CNC, Dominique Boutonnat, a également salué la reprise de la fréquentation, tout en étant conscient des défis à venir, et a souhaité réaffirmer son engagement auprès des exploitants, alors que certains témoignent d’une certaine méfiance vis-à-vis de l’institution. "Notre gouvernement et nous-mêmes sommes pleinement attachés à notre système et à ses vertus. Nous continuerons de vous accompagner comme nous l’avons toujours fait, en tentant de faire face aux défis qui s’annoncent".

Sur les engagements de programmation, Dominique Boutonnat estime que ces derniers devront assurer un renforcement de la diversité de l’offre cinématographique et une plus grande diffusion des œuvres. "Nous voulons permettre à toutes les salles de programmer le mieux possible." Les engagements de diffusion s’annoncent aussi essentiels pour permettre l’accès aux salles de tous les films "avec le meilleur maillage territorial possible."

Une nouvelle augmentation de l’enveloppe dédiée à l’art-et-essai ?

La réforme du classement art et essai s’annonce très attendue, avec une meilleure sélectivité. Cela ne se fera pas en réduisant le nombre de films ou de salles recommandées, mais en tenant compte du modèle économique des œuvres afin de récompenser celles qui sont programmées alors qu’elles sont les plus risquées. Cette réforme devra être validée lors du conseil d’administration du CNC en mars 2024 et mise en application dès l’été suivant.

Le président du CNC se dit par ailleurs nullement opposé à l’augmentation de l’enveloppe budgétaire dédiée à l’art et essai "même si cela s’annonce complexe puisqu’elle était de 16 M€ en 2019 et que nous l’avons passé à 18 M€. Elle a donc augmenté de 15% en trois ans. Soit plus qu’aucun autre dispositif du CNC. Nous verrons ce qu’il est possible de faire tant nos objectifs sont principalement axés vers l’éducation à l’image, comme en témoigne la renégociation des conventions Etat-Régions pour réorienter une partie des budgets vers le recrutement de médiateurs culturels. Notre objectif est d’en avoir 200 sur tout le territoire. Donc nous ferons ce qu’il est possible de faire mais cela n’est pas simple dans un budget contraint et qui a été en constante augmentation quand bien d’auteurs sont en décroissance."