Le documentaire : une attente sociale croissante

18 juin 2023
Alors que s’ouvre le Sunny Side of the doc du 19 au 22 juin à La Rochelle, le secteur audiovisuel semble de plus en plus friand de ce genre. Après la vogue des séries de fiction ces dernières années, serions-nous entrés dans une nouvelle ère où c’est le documentaire qui a le vent en poupe? A condition que le financement suive.
Sunny Side of the Doc 2023

Pour sa 34e édition, le Sunny Side of the doc a décidé de placer le public et les téléspectateurs au cœur des débats. ( Lire notre article du 11 mai ).

De fait, plusieurs chaînes françaises tiennent le même discours : face à un flux continu d’information, aux fake-news, à une profusion d’images du réel dont la véracité est mise en doute, le public a besoin de faire une pause, de prendre du recul, de décryptage sur le temps long. Et le documentaire répond à cette attente.

Longtemps, cette mission a été laissée aux chaînes publiques et le documentaire ne s’exposait qu’exceptionnellement en prime time. Aujourd’hui, toutes les chaînes disent vouloir prendre en compte cette attente “sociale”, élargir le public du documentaire, traditionnellement un peu plus âgé que celui de la télévision en général, à la classe d’âge des jeunes adultes. Et mieux exposer le genre en prime time, comme l’a déjà annoncé Canal+, comme France Télévisions pourrait le faire. Arte avait déjà indiqué au Fipadoc en janvier vouloir donner plus de place à un genre qui occupe 60 % de sa grille (100 heures par semaine) et auquel elle consacre cette année un budget en hausse de 4 %. Le documentaire se consomme de plus en plus à la demande et sur des plateformes de streaming dédiées au genre.

Mais il doit se renouveler, adopter des formes narratives plus proches de celles de la fiction, en série, avec des personnages forts. Les plateformes comme Netflix, des chaînes comme RMC Découverte ont “démocratisé le documentaire” selon l’expression de Stéphane Sallé de Chou, patron du pôle Entertainment d’Altice Media (RMC Story, RMC Découverte et la plateforme RMC BFM play).”En moyenne, on gagne 10 % d’audience en replay sur un documentaire de prime time, et même 30 % sur un film spectaculaire comme celui sur la Faille de San Andreas”, diffusé pour la première fois sur RMC Découverte le 18 avril, ajoute-t-il. La distribution sur tous les réseaux et plateformes pour toucher le maximum de public, la déclinaison d’un sujet documentaire sur différents support font aussi partie des stratégies pour mieux atteindre le public. 

Pour s’exposer en prime time, le documentaire se doit d’être “événementiel”. Sans cesser d’être “instructif”, il doit distraire et engager le spectateur, lui donner envie d’agir. La notion de documentaire d’impact, les campagnes de sensibilisation qui entourent la diffusion pour mobiliser le public, seront très présentes au Sunny Side. 

Pour autant, cette aura positive autour du documentaire ne garantit pas de meilleurs financements. Si de nouveaux acteurs entrent dans le jeu, comme le média en ligne Brut X, la plateforme de la RAI ( RAI Play) seront présents à la Rochelle, mais aussi des musées, des installations immersives,  le modèle no se complexifie. Et le budget de France Télévisions, premier financeur du genre en France est sous tension. 

En 2022, le volume horaire de documentaires aidés par le CNC a atteint 1669 heures, un niveau historiquement bas depuis 2013 (3.092 heures). Dans le même temps, le coût horaire des documentaires aidés n’a cessé d’augmenter, et a atteint 204,5 M€ en 2022 vs 158 en 2013. En 2023, année inflationniste, Signe que le schéma classique de financement de la production associant un diffuseur, un producteur et le CNC, ne suffit plus.