Les Arcs 2022 : Zoom sur les projets français du Village des coproductions

15 décembre 2022
Quatre projets français font partie des films présentés dans le cadre du Village des coproductions, qui a refermé ses portes ce mardi. Quatre premiers films singuliers en plein développement.

“L'Âge d’or” de Béranger Thouin (Go Go Go Films)

Gaumont Pathé Archives

A la Libération, Jeanne est emmenée par un groupe de résistants vers son exécution. Ce voyage vers la mort est l’occasion pour elle de repenser à la vie mouvementée qu’il l’a menée jusque-là. “Elle n’est pas tant condamnée pour ce qu’elle a fait à ce moment- là, mais pour l’ensemble de sa vie”, explique le réalisateur Béranger Thouin. “C’était une femme dans un XXe siècle fait par et pour les hommes qui, pour le moindre pas de côté, à chaque fois qu’elle suivait ses désirs, était condamnée et jugée.”

Le long métrage adopte une forme originale et ambitieuse : il est composé à moitié d’images d’archive, obtenues auprès de Gaumont Pathé Archives, qui s’entremêlent avec les images tournées pour le film. Une forme qui impose une manière de travailler particulière. “Nous sommes déjà en mesure de montrer l’entièreté du film à la manière d’un film d’animation puisque nous avons fabriqué la timeline avec pour moitié des images d’archives et pour l’autre moitié un storyboard des scènes que nous allons tourner”, dévoile Carole Ruszniewski, la productrice. Le long métrage, dont le budget pourrait atteindre entre 3 et 3,5 millions d’euros, est soutenu par les régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, ainsi que le département du Lot-et-Garonne et le CNC.

Si le rôle de Jeanne n’est pas encore casté, les comédiens Bastien Bouillon et Alba Rohrwacher font déjà partie de la distribution du film. Ils interprètent les deux amours de la vie de l’héroïne.

“Le Jour qui vient” de Manon Coubia (EL Films)

En 2005, l’effondrement d’une partie des Drus, un pic du massif du Mont Blanc, pousse deux anciens amants, une glaciologue française nommée Doria et un alpiniste américain prénommé Martin, à se retrouver. Ils ont tous les deux autour de la cinquantaine. Alors qu’elle se rend sur le lieu de l’effondrement pour l’étudier, il va tenter d’ouvrir une nouvelle voie pour escalader le pic. “C’est d’abord une histoire d’amour”, raconte Manon Coubia, la réalisatrice. “Le changement climatique n’est pas le thème central mais c’est une ligne qui est tendue tout le long du film. Les personnages sont dans un moment de bascule, où on commence à questionner nos pratiques, notre manière d’être et d’aimer.”

La cinéaste, qui est originaire de la région, s’est rendue sur place pour écrire le film et s’ imprégner des lieux. Une partie du tournage se déroulera en haute montagne, dans un refuge. “Nous sommes dans l’idée de faire un tournage où on rend possible l’accès à un décor”, commente Manon Coubia, qui coproduit également le film à travers sa société, The Blue Raincoat, installée en Belgique. “On fait le choix d’un dispositif léger qui simplifie les choses car on est obligés d’être à l’économie.”

Le film compte déjà Yoann Zimmer et Jean-Marc Barr au casting, ce dernier interprétant le rôle de Martin. “Nous venons ici au bon moment car le scénario vient d’être terminé. Le projet a reçu un très bon accueil chez les distributeurs et les vendeurs internationaux”, se réjouit Emmanuelle Latourette, la productrice. “Ils voient le potentiel du film avec son casting et son caractère romanesque.” Le projet, dont le budget atteint 2,2 millions d’euros, dispose déjà des aides au développement du CNC et de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le tournage est prévu à l’automne prochain.

“Blueprint” de Josza Anjembe (Yukunkun Productions)

Abi, 27 ans, est un jeune homme noir qui, après des études de journalisme, travaille dans un entrepot comme manutentionnaire. Lorsqu’il décroche un emploi dans une rédaction parisienne, il tombe amoureux de Gaëtan, qui a grandi dans un milieu différent. Abi se retrouve confronté au racisme systémique et aux micro-agressions de son nouveau milieu, très majoritairement blanc. “C’est un projet qui parle d’identité, dans la lignée des courts métrages qu’elle a réalisé”, détaille le producteur Nelson Ghrenassia, qui a accompagné la réalisatrice Josza Anjembe sur ses deux précédents courts. “C’est un film sur la question du compromis, jusqu’où nous sommes prêts à aller pour avancer, pour ne pas faire de vagues. Le film pose la question du racisme systémique, des impensés qu’on charrie tous dans la société et aussi au sein du couple. Des questions que peu de récits ont abordé en France, mais qui existent dans beaucoup d’œuvres aux Etats-Unis.”

Le long métrage, dont le titre français n’est pas encore connu, est soutenu par le CNC et la région Grand Est. Il entre en financement avec l’objectif d’être tourné en 2024.

“Les Filles Désir” de Prïncia Car (After Hours Productions)

Louis Aldebert

L’histoire d’un groupe de jeunes dans un quartier Nord de Marseille, qui vient tout juste de reprendre le centre aéré du coin. Le retour de Carmen, une amie d’enfance et ancienne prostituée, va mettre en péril l’équilibre du groupe et la reprise de ce centre. “Dans ces quartiers là, les rôles sont très codifiés, il y a une place pour les femmes, une pour les hommes. Elle arrive en rebattant les cartes”, explique Prïncia Car, la réalisatrice.

Depuis cinq ans, elle travaille avec un groupe d’une douzaine de jeunes au sein d’un atelier d’écriture qui est depuis devenue une école de cinéma alternative. Ils ont écrit plusieurs courts métrages ensemble et travaillent désormais au scénario de ce long métrage. Prïncia Car a reçu l’aide d’une co-scénariste pour écrire le séquencier du film et laisse aux jeunes, aujourd’hui âgés de 19 à 23 ans, le soin d’imaginer les dialogues à partir d’ateliers d’improvisation. Ils disposent tous d’un contrat d’auteur et seront crédités.

Une approche unique qui a séduit la productrice, Johanna Nahon. “Ce qui m’a intéressé dans le projet c’est ce poids du collectif, l’idée de mesurer le courage qu’il faut à un individu pour s’en émanciper”, indique-t-elle. “Le film offre en plus une représentation de la banlieue qu’on a pas l’habitude de voir dans les médias et au cinéma. Ici, il n’est pas question de trafic de drogue ou de violences policières.”

L’objectif est d’aboutir à une version définitive du scénario au premier trimestre 2023, pour tourner le film en octobre. Aux Arcs, le projet a reçu “des retours unanimes”, se félicite Johanna Nahon. “Tout le monde nous a dit que c’était un film très contemporain, qui avait aussi une portée universelle.”